samedi 9 mai 2009

Rêve d'aigrettes

Tiens, à propos de mon pseudonyme (qui est le nom anglais d'une plante à la rareté discrète, et aux feuilles en dents de lion...), je viens justement d'en arracher de pleines poignées avant de me dire que j'étais vraiment cave de lutter contre des fleurs jaunes... Comme si je n'avais rien de mieux ni de plus poétique à faire, comme par exemple, je sais pas, moi, planter des pissenlits pour égayer le voisinage en apportant des touches de couleur à la sinistre monochromie des pelouses.

Ça m'a rappelé un petit texte que j'ai écrit il y a quelques années, et qui se déroule dans un futur proche, à la Orwell.

«Ben traversa la cour commune, un merveilleux bout de nature d’un vert pomme fluo, où les enfants des propriétaires pouvaient s’ébattre en toute sécurité sans risquer de tomber sur un caillou tranchant ou sur une plante allergène. La campagne gouvernementale d’éradication des mauvaises herbes – c’est-à-dire toutes les herbes sauf celle du catalogue officiel, une variété de gazon parfait – avaient fini par porter ses fruits, mais on n’était jamais trop précautionneux : on signalait de temps à autre un pissenlit qui profitait d’un jardin mal entretenu, ou d’une lézarde dans un mur pour menacer le quartier de ses aigrettes envahissantes. "Il n’y a pas plus fourbe qu’un pissenlit", disait la comptine qu'on faisait réciter aux enfants dès la maternelle. Une fois dans la rue, Ben respecta scrupuleusement les consignes de déplacement le long des rares passages autorisés aux piétons. Comme il n’y avait plus grand monde à surveiller, le travail de la Police avait gagné en qualité : chaque pas de Ben devait être filmé par au moins cinq caméras, et son identité contre-vérifiée toute les minutes par un agent derrière son moniteur ou par un robot-policier posté en haut d’une des tours de garde qui se dressait à chaque carrefour – les mauvaises langues les appelaient les miradors, mais les mauvaises langues se faisaient rares, comme les mauvaises herbes. »

Ben, c'est le nom con par excellence. C'est pour ça que je l'ai choisi pour mon texte, et que ma mère m'en a affublé en deuxième prénom.
Ben, comme "benêt", ou "que veux-tu faire, plus tard ? Ben j'en sais rien !".
Ben, comme la benne à ordure.
Benoît, comme le pape, le "béni", Benito, amen ; Benjamin, comme le petit dernier qu'on ne prend jamais au sérieux ; Ben comme "fils de", Ben comme dans "va bene", Ben comme le Big Ben, une horloge qui me rappelle immanquablement... Benny Hill.

Pour revenir à nos pissenlits, il y en aura encore quand nous aurons tous disparu de la surface de la Terre dans une gigantesque explosion de dinosaures clonés sur une météorite, ou dans les toux grasses d'une ultime grippe canine ou batracienne. Alors pourquoi devrais-je me faire du mouron ?

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